Le feuilleton a pris fin. Après un mois riche en négociations et en tergiversations, le mercato d’hiver s’est terminé il y a maintenant un peu plus d’une semaine. Un marché qui a vu des transferts majeurs se conclure, comme ceux de Pierre-Emerick Aubameyang à Arsenal ou bien encore de Philippe Coutinho au FC Barcelone.
Plus uniquement un simple marché d’ajustement, le mercato hivernal est en train de se transformer. Journaliste à la rubrique football de L’Equipe, envoyé spécial permanent à Lyon et spécialiste mercato, Bilel Ghazi a bien entendu suivi l’évolution de ce mercato avec attention. Habitué des scoops, son avis vaut forcément le détour
Alors, quel bilan fait-il du dernier mercato d’hiver ? Comment travaille-t-il avec les agents de joueurs ? Quel regard porte-t-il sur les critiques émises à l’encontre du marché hivernal ? Pour agentfootball.fr, Bilel Ghazi se livre.
Le mercato d’hiver vient de fermer ses portes. Quel bilan faîtes-vous ?
« Tout dépend si on l’analyse du côté français ou étranger. Du côté étranger, il y a toujours cette forme d’inflation, ces chiffres un peu fous : les transferts en Angleterre, Coutinho au Barça, etc. En France, un club comme l’ASSE a été particulièrement actif. On a le sentiment qu’ils ont renouvelé près de la moitié de leur équipe-type. Pour les équipes en difficulté, ça a été de l’ajustement. Enfin, le PSG en a profité pour prendre une sentinelle.
En fait, ce qui est plus étonnant, c’est qu’on continue avec des sommes folles même en hiver avec Aubameyang ou Coutinho par exemple. Ce n’est plus seulement de l’ajustement. Maintenant, les clubs veulent se renforcer à mi-parcours en Ligue des Champions ou dans la course au titre. Il y a un marché des gros clubs européens et en Angleterre et, pour le reste, un marché d’ajustement pour compléter des manques. J’entends beaucoup de critiques sur le mercato d’hiver, je peux les entendre. Mais vu comment les clubs l’utilisent pour se renforcer ou s’ajuster, c’est un mercato qui continue de vivre ».
Comment travaillez-vous durant le mercato d’hiver ?
« Le mercato d’hiver est toujours un peu traître parce que c’est assez court. Tu as toujours le sentiment que ça va aller très vite, que les clubs vont vite recruter. Mais on l’a vu, il y a encore eu beaucoup de transferts sur la fin du mois de janvier. Il y avait en France des moments où, pendant 3-4 jours, il n’y avait pratiquement pas de mouvements. Puis ça s’accélère après les matches ou en fin de mercato. Pour moi, c’est un travail moins intensif que durant l’été. C’est peut-être dû au fait que ce n’est pas toute une campagne de recrutement. C’est plus court, intense, mais moins fatigant que l’été. La gymnastique de travail est différente ».
« On part du principe que, quand on démarre une compétition avec un effectif, on doit la terminer avec le même effectif. Je peux comprendre le principe idéal de la chose. Maintenant, la réalité d’une saison fait qu’il faut être pragmatique : des ajustements peuvent être nécessaires. »
De quelle façon opérez-vous avec les agents de joueurs ?
« Ce mercato étant plus court, il nécessite une réactivité plus forte. C’est un mercato qui se prépare en amont sur le mois de décembre. Il faut observer les besoins des clubs, les joueurs susceptibles de s’en aller par manque de temps de jeu. Le travail d’identification est plus facile car on est à mi-saison et les joueurs savent s’il est dans leur intérêt ou non de rester.
On arrive mieux à cibler les agents de joueurs à contacter. Mon principe de fonctionnement, c’est cibler dans un premier temps les joueurs susceptibles de partir. C’est plus facile de procéder comme ça : définir qui est susceptible de partir, appeler l’agent de joueur, et savoir les solutions envisagées. Le fait qu’une demi-saison soit écoulée rend plus facile le ciblage des joueurs ».
Est-ce de cette façon que vous avez procédé au sujet de l’Olympique Lyonnais, club que vous suivez au quotidien pour L’Equipe ?
« C’était ça. Il fallait identifier les joueurs susceptibles de partir par manque de temps de jeu, ceux susceptibles de partir s’aguerrir en prêt. On fait un peu le tour des agents sportifs, on fait le tour avec le club. Dans les conférences de presse, on essaie de savoir qui a un bon de sortie ou non. C’est souvent comme ça. Après, autant on savait que l’OL était sur Léo Dubois et que, en fin de contrat, ça pouvait se faire dès le 1er janvier. Autant sur un dossier comme celui de Martin Terrier on a tous été un peu pris de court. On ne pensait pas l’OL susceptible d’anticiper aussi vite son arrivée. Mais je pense que c’est aussi lié à la situation de Lille ».
Enfin, comment expliquez-vous les critiques dont fait régulièrement l’objet le mercato d’hiver ?
« Je pense que c’est une question de moralité du sport. On part du principe que, quand on démarre une compétition avec un effectif, on doit la terminer avec le même effectif. Je peux comprendre le principe idéal de la chose. Maintenant, la réalité d’une saison fait qu’il faut être pragmatique : des ajustements peuvent être nécessaires.
Il y a des compétitions à gérer, et dans les deux sens d’ailleurs. Car des clubs peuvent avoir besoin de dégraisser s’ils voulaient exister sur quatre tableaux mais ont été éliminés en cours de route. On peut imaginer que pour Monaco, qui a été éliminé en Ligue des Champions puis en Coupe de France, le fait d’avoir un gros effectif n’est pas forcément une bonne chose. L’ASSE, qui a beaucoup recruté, a aussi dégraissé en fin de mercato ».
Agentfootball.fr remercie chaleureusement Bilel Ghazi d’avoir pris le temps de nous éclairer sur la question du mercato hivernal et son mode de fonctionnement avec les agents. Pour suivre Bilel Ghazi, rendez-vous sur Twitter @BilelGhazi.